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26.02.2009

Retour à Gaza

Peut-être vous souvenez-vous de ma note du 13 janvier dernier. J'y exprimais mon désarrois devant ce que subissaient alors les habitants de Gaza. Suite à sa mise en ligne, j'ai été invitée à participer au collectif paru cette semaine chez La boîte à bulles dans la collection "Contre Coeur". Cet ouvrage hybride et conçu dans l'urgence n'en est pas moins remarquable. (J'écris cela en toute franchise, car ma contribution y est vraiment ultra modeste - juste une illustration.)

Hybride - parce qu'il rassemble des témoignages directs, des dépêches AFP, des éléments d'histoire et de géographie, des interviews, des textes de journalistes et d'universitaires... le tout accompagné de dessins de presse, de BD, d'illustrations et de photographies - mais pas fouillis pour autant ! Tout est classé chronologiquement : les faits, les réactions, les analyses et mises en perspective.

Conçu dans l'urgence - parce qu'il est né fin 2008, dans le cerveau (et le coeur) d'un jeune illustrateur qui n'arrivait plus à se concentrer sur son travail et s'est mis en quête de ceux qui pourraient lui (et nous) donner quelques réponses à ses lancinants "pourquoi ?" - mais pas "vite fait" ! Le résultat est impeccable. Connaissant le travail que cela représente, je suis admirative !

Bien sûr, il y figure quelques "pointures" - telles que Rony Brauman, Michel Warschawski, Alain Gresh, Simone Bitton ou Pierre Stambul - que je connaissais déjà pour m'intéresser à ce conflit depuis longtemps. Mais c'est aussi l'occasion de découvrir d'autres voies, tout aussi fortes et intéressantes : celle d'Anne Paq, photographe française qui travaille en Cisjordanie, m'aura personnellement beaucoup marquée.

 

Place aux images...

(cliquez dessus pour agrandir)

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Couverture de Maximilien Le Roy
Témoignage de Salma Ahmed mis en images par Thomas Mathieu
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Photographies de Tess Scheflan et Karen Manor
Bande dessinée de Louïc
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Carnet de voyage en Palestine de Bruno Pilorget
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Photographie de Maxence Emery
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Le Cri de Gaza (ma contribution) qui par hasard fait écho à...
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...celle de Soulman


Pour en savoir davantage, suivez ces quelques liens :
> La présentation de l'ouvrage sur le site de l'éditeur.
> Deux critiques en ligne sur bdtheque.com.
> Le blog de Maximilien Le Roy, dessinateur à l'origine du projet.
> Une chronique sur le site de rfi (in english)

PS : Je dédie cette note à Laurence... avec mon @mitié !

13.01.2009

Cher Journal,

C'est la nuit noire. Je me relève pour écrire. Plus fort que moi. Je ne peux pas dormir. Je guette tous les bruits. Dedans, dehors. Je ne sais pas pourquoi. Comme si j'y étais obligé. Pourtant, personne  ici ne dort, j'en suis sur.
Yaya ?
Je jurerais que non.
Un jour, elle a dit qu'avec l'âge on perdait le sommeil.
On vieillit vite, ici...
Rouslan, lui non plus, ne dort pas. Il se tient assis devant sa fenêtre. Au dessus de ma chambre. Je l'entends qui bouge de temps en temps. Il se tue les yeux à lire ou à écrire.
Comme moi...
Ah, la belle armée que voilà ! Tremblez, soldats ! Sur vos chars, dans vos hélicoptères ! Tremblez devant les glorieux insomniaques ! Voyez ces braves fantassins, comme ils manient bien le stylo ! Admirez-les, qui versent du sang d'encre plein leurs champs de bataille en papier quadrillé !
Qui dort en ce moment ? Qui peut dormir encore ? La peur, la haine et le malheur au ventre. Qui peut accomplir ce prodige ? S'abandonner, confiant, dans les bras du sommeil...
Un fou ? Un sage ? Un innocent qui ne sait rien, ni de la vie, ni de la mort. Un enfant, peut-être ? Un nouveau-né, alors. Le bébé d'Assia en sait déjà trop. Il tète la révolte au sein d'Assia et sent les bombes frôler son berceau. Trop tard ! Le voilà sur la liste des abonnés aux cauchemars...
Et mes soeurs, dorment-elle ?
Je ne sais pas. Nous ne parlons pas de cela. Nous ne parlons pas non plus d'autre chose. Nous ne nous parlons presque plus.
Le désespoir, la peur et la colère, ça pèse lourd dans nos poitrines.
Ça les écrase, les mots.
Ça les étrangle...
Pauvres mots ! Ils sont à notre image, sans force et désarmés. Ils restent là, tapis dans le noir de nos coeurs, comme de petits animaux traqués.
Parfois, ils s'impatientent, palpitant de l'envie de dire ce qu'ils savent de nous. Mais il ne peuvent plus s'échapper de nos bouches. Ils essaient quelquefois, n'y arrivent jamais. Ne parviennent plus à se hisser jusque-là...
Heureusement, tu es là, cher Journal.
Dès que je t'ouvre, les mots reviennent. Me coulent du coeur à la main. Je me demande ce qui leur donne ce courage.
Le silence, peut-être...
Car user de la voix, c'est risquer de crier d'effroi.

Extrait de Soliman le Pacifique (Journal d'un enfant dans l'Intifada)


Ayant lu ces quelques lignes, peut-être comprendrez-vous mieux pourquoi j'ai tant de mal à célébrer l'année qui vient, à vous faire partager rêves et projets "comme si de rien n'était"...
Je pense aux cousins de Samy, à tous les petits Soliman, qui (sur)vivent (?) à Gaza. Et mon coeur tremble avec les leurs, tétanisé par la fatigue de toujours espérer en vain. Par la tristesse, immense. Et ce sentiment poison d'impuissance.
Désolée de plomber l'ambiance...

Ça les écrase, les mots.
Ça les étrangle...

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(La Paix Maintenant)


> À suivre, Gaza Sderot Blog (via Arte.tv) et toujours les sites de Shalom Arshav et de la CCIPPP.

20.03.2008

Faire-part de (re)naissance

Il était épuisé depuis quelques mois... Le revoilà !

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(à suivre !)

08.10.2007

Signatures


 

22.06.2007

Une pomme pour deux

9f624f95e968fec7117f41662b702a2d.gif Vous souvenez-vous des Premières Histoires de Popi ? Avant qu'elles ne s'effacent pour mieux laisser place au malicieux Tralalire, j'y avais publié l'un de mes textes les plus... courts !
C'est l'histoire de deux petits vers qui, sans le savoir, choisissent le même fruit pour demeure. Les illustrations, signées Virginie Guérin, sont vraiment réussies. Grâce à quelques plans de coupe audacieux, on peut voir les intérieurs fort douillets des deux petits habitants de la pomme : tro-gnon !
Quand je la lis à haute voix aux enfants des classes que je rencontre, cette histoire de partage destinée à de tout petits lecteurs (entre 2 et 4 ans) a toujours du succès, même auprès des collégiens ! Mais oui, je la lis aux adolescents - notamment quand ils étudient Soliman le Pacifique - pour détendre un peu l'atmosphère et montrer comment les idées mûrissent...
Car dans ce petit magazine, l'auteur devait confier (à la rubrique "Les coulisses de l'histoire") comment il avait eu l'idée de départ de son texte. Voilà ce que j'avais écrit.
 
La question de l'inspiration est toujours délicate, mais je crois pouvoir deviner comment Une pomme pour deux est née. Comme l'ampoule qui s'allume dans le cerveau des héros de bandes dessinées, l'idée surgit souvent de la rencontre (plutôt inattendue) entre différentes préoccupations, grandes et petites, profondes et passagères.
D'abord, dans ma vie de maman, il m'arrive d'avoir à régler quelques conflits : "Il faut apprendre à partager" est une phrase que je connais bien. Ensuite, j'ai écrit cette histoire en automne. Chaque jour, nous ramassions les pommes tombées dans le jardin. Nous croquions les plus belles, et mon mari découpait avec soin celles soupçonnées d'être "habitées". Enfin, c'était aussi pour moi le temps des dernières retouches au manuscrit de mon roman Soliman le Pacifique (Journal d'un enfant dans l'Intifada), qui se place au coeur du conflit israélo-palestinien. Là encore, il est question de partage...
Peut-être faut-il voir dans cette pomme le fruit de tout cela ? Je ne sais pas. Quoi qu'il en soit, pour moi, le plus important dans l'histoire, c'est... la poire, la seconde chance, l'espoir d'une entente toujours possible !
 
99b818154b4f70b5ff87fc74843dbf54.jpgMa pomme, ma poire et mes deux petits vers ressortent ces jours-ci dans le numéro 371 (juillet 2007) d'Enfant Magazine, mais sans les images de Virginie - dommage !
 
 
Quant à l'espoir de voir un jour, enfin, mon petit Soliman grandir en paix en Palestine, je le pleure tristement...
 

21.05.2007

Simple, la paix ?

Aujourd'hui, grande première : je délibère et juge. Mais non, je ne suis pas à Cannes ! J'ai été invitée à faire office de juré pour un concours de dessin co-organisé par l'Education Nationale et l'association Fair Events, sur le thème de la paix.
Pourquoi donc ai-je été sollicitée ? Sans doute est-ce en rapport avec mon roman Soliman le Pacifique... Je sais seulement que nous serons une dizaine à devoir choisir, en deux temps et en argumentant, cinq oeuvres dans chacune des deux catégories, celles des élèves des écoles et celles arrivées via Internet.
Pourquoi ai-je accepté ? Simplement par curiosité... Car je suis bien consciente du caractère dérisoire de l'affaire. Et je sais qu'en me rendant rue Monge, sur les lieux de la délibération, j'entendrai la petite voix de Naïm (le héros d'Une bouteille dans la mer de Gaza, de Valérie Zenatti) qui se moquera de moi comme de sa correspondante israélienne :
"Ou envoie ta lettre à un concours genre "Des enfants pour la paix". Je suis sûr que l'Unesco organise plein de trucs de cet acabit avec des dessins de gamins où on voit des colombes blessées qui ressemblent à des poules mal égorgées, des rameaux d'olivier qui jonchent le sol et des poèmes où le mot "paix" apparaît en acrostiche."
Mais je sais aussi qu'en descendant à la station de métro Cardinal Lemoine, je penserai à Simple, de Marie-Aude Murail. C'est par là qu'habitent Kléber, son frère et leurs co-locataires, qui nous réjouissent beaucoup, mes enfants et moi, chaque soir à l'heure de la lecture, depuis une semaine.
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Alors... la paix ?  "Oh, oh, joli mot !"

13.02.2007

Message personnel (4)

Aux élèves du collège des Mûriers de Cannes-la-Bocca qui m'ont accueillie parmi eux hier, à leurs trois professeurs et à leur documentaliste : MERCI ! Pour moi, grâce à vous, la journée fut riche et intense. Je m'en remets doucement aujourd'hui, relisant vos questions, vos lettres... et me maudissant d'avoir oublié de vous dire ceci ou cela.

Je vous adresse aussi un grand BRAVO pour tout le travail accompli, par chacun, à son poste. Lire ce que l'on a écrit en public n'est pas simple - je sais de quoi je parle ! - et porter un tel projet, sur la durée, avec cet enthousiasme... j'admire infiniment. Tout cela fait chaud au coeur et décuple l'envie d'écrire !

 

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Pour vous, le ciel au-dessus de l'aéroport de Nice juste avant que je m'y envole : une minute de bonheur, magique et pur. Savez-vous que, comme Paloma la colombe, l'arc-en-ciel symbolise la PAIX ?

25.01.2007

Le déserteur

18.12.2006

Départ pour Châtillon-sur-Seine

medium_sc_a01.gifujourd'hui, je prends le train pour la Côte d'Or. Je vais y rencontrer les élèves d'un Lycée Agricole, notamment une classe de BEP option "soigneurs d'équidés". C'est leur documentaliste, Nathalie Jacquenet, qui m'a contactée. Ses motivations et son projet m'ont vite convaincue :

"Je constate en effet chaque année qu'une telle rencontre avec nos élèves, a priori réticents à la lecture, est une belle occasion de dépasser certaines crispations, certains comportements stéréotypés. Il en ressort des échanges riches humainement. Par ailleurs, le thème que vous avez évoqué dans vos deux romans, Lettres à une disparue et Soliman le Pacifique, intéresse les élèves. Ils sont très sensibles à l'injustice, la contrainte, l'absence de liberté de choix...

Je suis heureuse de rencontrer des "grands", heureuse à l'idée de leur parler de mes deux romans, de faire le lien entre eux. Et puis... je sais que la rencontre a été préparée avec grand soin :

"Actuellement, je retrace aux élèves l'histoire du judaïsme depuis Moïse et je leur lis des extraits de vos romans ou d'autres récits : Si tu veux être mon amie, de Galit Fink et Mervet Akram Sha'ban, L'Attentat de Yasmina Khadra. J'aborderai ensuite la question palestinienne à travers la culture des oliviers comme facteur de dialogue entre les deux peuples. En ce qui concerne l'Argentine, je leur lirai des extraits du livre d'Eduardo Galeano, Mémoire du feu, dans lequel il parle des enfants adoptés par les bourreaux de leurs parents. Je voudrais également leur faire écouter une chanson d'Atahualpa Yupanqui, en nous attardant sur le texte."

Bonne journée à vous - pour la mienne, je suis confiante !

 

11.05.2006

Soliman en Suisse

Petite fierté. Sur le portail officiel de l'éducation suisse, Soliman le Pacifique est à l'honneur. Juste entre Le chat de Tigali de Didier Daeninckx et  Persépolis de Marjane Satrapi ! Référencé aux mots-clés "droits humains", "éducation à la paix" et "racisme et exlusion", il est proposé à l'étude en cours d'histoire, de français et d'éducation à la citoyenneté. En voici la présentation :

 

Ce livre permet de découvrir la vie quotidienne du peuple palestinien. Une brève présentation rappelle le contexte historique et les conditions de la création de l'état d'Israël en 1948 puis la difficile recherche d'un processus de paix viable depuis 1993.
Ce que Soliman raconte, c'est l'absence d'espoir, la rencontre impossible entre deux communautés pourtant proches l'une de l'autre, l'alternative entre haine et colère. Le héros prend le parti d'exprimer sa rage en jetant des mots sur des pages plutôt que des cailloux sur les hommes.

 

Par ailleurs, ce livre fait partie du kit DIGNO, une malette de livres de littérature jeunesse avec dossier pédagogique, destinée à aider les établissements scolaires à monter des projets de sensibilisation des élèves au racisme et à la discrimination. Pour plus d'informations, cliquez ci-dessous.

 

Digno – Neuf livres pour aborder la discrimination

 

 

21.03.2006

À la moulinette de Proust

Le  23  février  dernier,  je rencontrais deux classes de collège à Maurepas, dans les Yvelines. Les élèves avaient lu Lettres à une disparue et préparé de grands panneaux, disposés dans la documentation. Dessus, entre autres choses, des affiches entières de questions, dont certaines empruntées au fameux "questionnaire de Proust".

À la vue de celles-ci, soudain, j'ai senti remonter en moi une vieille angoisse oubliée, l'angoisse de l'interro surprise ! L'éternelle collégienne cachée tant bien que mal sous mon masque d'adulte fut aussitôt tentée d'implorer l'indulgence - voire la pitié - de ses examinateurs. Au secours ! Je n'ai pas révisé, moi ! Je ne sais pas quel est mon principal défaut - j'en ai trop ! Ni comment j'aimerais mourir. Et si la couleur que je préfère est tantôt le rouge, tantôt le noir, je n'ai pas fait mienne la moindre petite devise... La honte intégrale !

Prenant sur moi, tentant vaguement de réajuster mon masque, j'ai tout de même essayé de répondre, le plus honnêtement possible. Voyant que peu à peu je rentrais dans le jeu, de nouvelles questions se mirent à fuser... Et mes réponses aussi ! Finalement, l'échange eut du rythme et il fallut l'interrompre pour passer à la suite.

Ainsi me suis-je entendu dire que ma fleur préférée demeure la pivoine - ce qui n'a rien d'étonnant pour une grande timide rougissant à tout bout de champ ! - et que j'aimerais mourrir tout en le sachant, le temps de dire adieu à ceux que j'aime...

 

De Proust à Frankenthal

À la question "Quel est votre héros dans la vie réelle ?" j'ai un peu hésité, cherché dans le passé... Puis, tout à coup, j'ai pensé à un homme dont je venais tout juste de découvrir l'existence, grâce à l'association Shalom Arshav (La Paix Maintenant). Cet homme s'appelle Itzhak Frankenthal. Il est israélien, juif orthodoxe et en 1994, il a perdu son fils Arik, assassiné par des militants du Hamas. Face à ce drame personnel, inscrit dans un drame évidemment bien plus grand, cet homme a réagi d'une manière extraordinaire : "Je n’ai pas voulu devenir un autre de ces parents endeuillés qui ont perdu un enfant et qui soutiennent cette même politique qui a causé sa mort. Je n’ai pas voulu cela."

Aussi a-t-il liquidé sa société et utilisé les fonds pour créer une association de parents endeuillés - palestiniens et israéliens - vouée à la réconciliation entre les deux peuples. Les parents se sont rencontrés, ont pleuré ensemble, puis sont allés porter le message de l’acceptation mutuelle dans les écoles et dans d’autres institutions, en Israël, mais aussi à Gaza et en Cisjordanie. Ces actions conduisent Itzhak Frankenthal à rencontrer des Palestiniens de tous horizons, y compris de nombreux militants du Hamas. L'échange n'est pas toujours facile, bien sûr : "Certains de ces gars-là hurlent avec une telle colère... Ils n’ont pas l’occasion d’exprimer leurs émotions à un Israélien. Mais la colère, c’est si proche d’une douleur insupportable que souvent, ils hurlent jusqu’à ce qu’ils s’effondrent en larmes."

Ces paroles m'ont beaucoup touchée. Comment ne pas les rapprocher de ce que j'ai écrit dans Soliman le Pacifique (Journal d'un enfant dans l'Intifada) ? Nora, la grande soeur de Soliman, comme lui pacifiste, se désespère. Puis Rouslan, l'ami de toujours, lui répond...

-

"(...) Nous, on voudrait que ça change. Mais on ne sait pas comment faire ! Tous les autres, ceux qui veulent la guerre, la vraie, hurlent plus fort que nous. La paix, la fraternité, toutes ces idées généreuses ont l'air tellement utopiques face aux cris de vengeance...

- Parce qu'elles demandent aux hommes des trésors de sagesse, a dit Rouslan. Pour faire la paix, il faut essayer de comprendre l'autre. Il faut donc l'écouter. Et cesser de crier... Mais cesser d'avoir mal ne se décide pas. Or, nous avons mal. À notre identité, notre histoire, notre terre. C'est pourquoi nous crions..."

-

Aujourd’hui, Frankenthal s’est engagé dans un nouveau projet, l’Insititut Arik (http://www.arikpeace.org/Eng/), grâce auquel il veut faire comprendre à ses compatriotes que "les Palestiniens réagissent aux souffrances que leur inflige l’occupation. Une fois l’occupation terminée, les deux peuples seront en mesure de vivre côte à côte, dans la coexistence et la stabilité". Pour les convaincre, il consacre aujourd’hui sa vie à encourager les Palestiniens à envoyer ce message. Seuls les Palestiniens, pense-t-il, peuvent faire comprendre aux Israéliens qu’ils ne sont pas une espèce à part, qu’ils ne sont ni intrinsèquement violents ni emplis de haine, mais des gens comme eux.

Son histoire personnelle lui donne la légitimité nécessaire pour porter ce message. "Mon fils, Arik, est né dans une démocratie. Il avait une chance de connaître une vie normale, tranquille. Il adorait sa vie, et pensait par ailleurs qu’il fallait que nous parvenions à faire la paix avec les Palestiniens, sans quoi nous ne survivrions pas. L’assassin d’Arik est né dans une occupation terrible, subissant humiliation après humiliation, une sorte de chaos éthique ; Si mon fils était né à sa place, il aurait pu finir par faire la même chose. Que tous ceux qui sont sûrs de leur bon droit, qui parlent de la cruauté des meurtriers palestiniens, se regardent bien dans le miroir."

Ces mots-là aussi font écho à Soliman, qui s'interroge :

-

Pourquoi notre histoire n'émeut-elle personne ? (...)

Aucun homme, sur la terre, ne peut accepter cela sans colère. Subir et se taire.

(...) Nos grands-parents ont été chassés de chez eux, nos parents se sont révoltés en vain. Maintenant viennent les enfants... et même en nous élevant loin des sentiments de haine, de vengeance, on ne peut empêcher la colère d'être là. De germer dans les coeurs. De couleur dans les veines. On peut mettre en garde contre elle, on ne peut pas faire qu'elle n'existe pas.

Souvent, je me demande si je penserais pareil si je n'étais pas palestinien.

C'est drôle à dire, ou plutôt, c'est étrange... parfois j'essaie d'imaginer que je suis juif et que je vis en Israël. Eprouverais-je alors la même compassion ? Notre douleur me révolterait-elle autant ?

Tout au fond de mon coeur, dans mon for intérieur - et je le jure sur la tête de ma Yaya - je suis sûr et certain que oui.

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Sans doute comprenez-vous pourquoi l'engagement d'Itzhak Frankenthal me touche... Si cette question vous intéresse aussi, je vous invite à lire l'article passionnant qui concerne son action sur le site de Shalom Arshav.

Quant à Proust, si vous voulez connaître ses propres réponses au fameux questionnaire, il faut aller ici. Vous y verrez que lui non plus n'avait pas de devise... Ouf ! Merci, Marcel !